Chroniques du site : Noces funèbres

(The corpse bride)

Réalisé par : Tim Burton / Mike Johnson (2005)

Avec les voix de : Johnny Depp, Helena Bonham Carter, Emily Watson





Si je voulais faire du mauvais esprit, d’emblée je pourrais dire que le titre français choisi pour cette « œuvre » relève limite d’un jeu de mots involontaire. Telle une métaphore du mariage de Tim Burton et de Hollywood, par exemple. Comprendre : Le monsieur a toujours été « mainstream », mais dans son genre à lui, une sorte de célibataire qui rapportait beaucoup, un type qui réussissait à faire des films d’auteur qui cartonnent (Edward aux mains d’argent, au pif). Maintenant, Tim Burton s’est maqué et ce sont ses experts en communication qui lui écrivent ses… comment on appelle ça, déjà ? Ah oui, des dialogues.

Mais comme je ne veux pas faire du mauvais esprit, disons que je n’ai pas écrit ça.

Voici donc la comédie nécrophile de l’année.

Comme c’est émouvant. On dirait un Disney dans lequel on a remplacé les animaux parlants par des macchabées.

A commencer par les cadavres des talents de Burton et d’Elfman (même lui, il a réussi à le débaucher). Aucune des pseudo « chansons » de cette resucée (comme on pouvait justement le craindre) de L’Etrange Noël de Mr Jack n’atteint la cheville de son originale. Comme quoi, avec les même personnes et quasiment les même ingrédients qu’un chef-d’œuvre, on peut faire une bouse.

Ratage complet, tant au niveau de l’intrigue – avec le méchant qui grimace en arrière-plan, qu’on grille depuis la dixième minute et dont on découvre à la fin… que c’était le méchant ! – que d’un point de vue technique (les couleurs sont jolies, mais j’ai trouvé que le cadrage des plans était tout sauf inspiré), les Noces Funèbres sont surtout déprimantes. Que reste-t-il de ce désastre ? Quelques fulgurances, quelques scènes qui éclatent (l’histoire de la mariée, son apparition spectrale dans la chambre de sa rivale) et témoignent de ce qu’aurait pu être The Corpse Bride, cinq ans auparavant, avant les Charlie et la Chocolaterie et autres Planète des Singes… Où est le Burton de Vincent, hormis dans la vitrine publicitaire cliché de ce film-photocopie ? A quoi bon foutre des spirales et des personnages filiformes partout ? Pourquoi des traits aussi outranciers (genre le curé avec un menton qui fait la taille de sa tête) sur les marionnettes ? Et on ne parle même pas des chapeaux… Tout le design est plat, mal fait, grossier, et prétentieux…

Là où L’Etrange Noël de Mr Jack était un conte de fée bizarre qui pouvait plaire aux adultes, The Corpse Bride se veut un Burton plus adulte (avec les thèmes du mariage arrangé par exemple, de la religion et de la « normalité »), qui est d'un niais déprimant et paradoxalement dpnc, fait sévèrement baisser le niveau. Il y a des morts, mais ce n’est pas « funèbre ». Le gag du zombi qui perd un membre ou un œil, franchement c’est juste pathétique. Hormis une danse de squelettes (un peu longue) qui fait penser à l’antre de Oogie Boogie dans L’Etrange Noël… c’est le calme plat. On a même droit à des personnages de bouffons comme on croit de bon ton d’en mettre dans les films pour les gniards. Et sinon ? Pompage toujours sur le modèle, un peu partout, jusqu’au personnage du chien squelette (pour varier avec le fantôme de Nightmare before Christmas…), voire même à travers certains thèmes musicaux (qui tirent déjà sévèrement sur la corde). Plus grave, l’univers fantastique décrit n’a aucune cohérence (genre un coup on a besoin d’un filtre magique, et puis après non) et verse rapidement dans le grotesque. Là où Jack restait un démon, malgré ses excentricités, la mariée mort-vivante fait office de potiche. Il lui faut même une chanson toute pourrie pour lui remonter le moral de temps en temps, histoire qu’elle apprenne à s’accepter en tant que personne « différente »…

Alors, le Monde des Morts des Noces Funèbres, c’est quoi ? Un bar repiqué à Hasta Los Uesos, un court-métrage mexicain, et quelques rues peuplées (hélàs) majoritairement par les « amis » de la morte, araignée chantante (et terriblement crispante) et ver de terre jamais drôle (qui essaie beaucoup trop, d’ailleurs) en prime.

Halala. Au moins, Tim Burton ne pourra pas faire pire. Ce n'est pas possible. S’il décline encore, ça va vraiment commencer à se voir, et là adieu les royalties.